Nuages survolant les montagnes du Bhoutan.

Fab23 – Bhutan Challenge

Le séminaire annuel des FabLabs ayant lieu au Bhoutan cette année, c’était l’opportunité pour oser y aller (et utiliser mon budget décennal de carbone/avion), un peu comme quand Fab9 avait été au Japon.
Petit journal de ce voyage.

14 juillet : Caen-Paris

Journée dans le train pour prendre l’avion tôt le lendemain.
Départ de Caen à 16h, enfin 17h30 car un arbre avait endommagé un caténaire.
Arrivé sur Paris vers 22h, le 14 juillet, soir où les préfectures ont fait en sorte que les tram/bus s’arrêtent par craintes d’émeutes. Reste heureusement les RER pour rejoindre mon hôtel proche de l’aéroport.

15 juillet : CDG-AUH-CCU

Nouvelle journée, nouveau jet de dé ? Pour atteindre le Bhoutan il faut passer par un aéroport proche, tel que Calcutta, avec un seul vol local par jour, seulement certains jours. Pour arriver à Calcutta le jour d’un de ces précieux vols j’avais trouvé un transit par Abu Dhabi.
Sauf qu’une fois dans l’avion… le départ a été reporté d’environ 2 heures (conditions météo et/ou encombrement du trafic je crois), de quoi manger tout le temps de la correspondance. J’ai quasiment pu écouter la version livre audio de Red Team Blues d’une traite (~10h de Wil Wheaton), pour une note positive, mais me voilà bloqué pour la nuit ici, tout le reste reporté d’un jour puis deux…
Je ne suis pas le seul, deux autres personnes sont dans le même cas, et l’inconscient grégaire nous rend tout à coup solidaire. Au final un taxi et une nuit d’hôtel sont fournis par la compagnie (après moult aller-retours dans l’aéroport, ne trouvant tel bureau ou le confondant avec un autre).
Demain est un autre vol.

16 juillet : AUH-CCU

Même chose dans l’autre sens, taxi, aéroport, patienter (lire le chouette numéro 8 du LowTech Journal), léger retard au départ… les plateaux repas de cette compagnie sont excellents en tout cas.
Le temps du vol je termine mon livre audio, et je découvre que j’ai un documentaire classé par erreur dans mon dossier musique : Objectified (sur le design industriel). Il date de 2009, mais avec le recul j’apprécie d’autant plus les cinq dernières minutes, où l’on mentionne : l’innovation ascendante, sa mise en commun via des plateformes (je doute qu’ils le savent au moment du film mais c’est le début de Thingiverse à l’époque), des machines et procédés de fabrication devenant accessibles à tout le monde (#FabLab), l’opportunité pour les designers de se rapprocher des étapes finales (plutôt que détaché en bout de chaîne) ce qui pourrait contribuer à résoudre la superficialité de certaines productions, la valeur/légitimité du design pourra ainsi venir de sa contribution à la survie de l’espèce, valoriser ce qu’on a déjà avant d’en fabriquer d’autres. Bref, toujours bien à revoir quand on s’apprête à participer à une réflexion sur la tradition des métiers à tisser au Bhoutan.

J’avais pas mal repéré le terrain entre l’aéroport et l’hôtel le plus proche, espérant le rejoindre à pied, mais peine perdue, ça manque d’un trottoir. J’ai du me résoudre à accepter de faire les 800m à l’aide d’un aimable taxi-moto.

17 juillet : CCU

Heureusement le e-visa dure 30 jours. Ce n’est donc pas gênant si cette partie de la correspondance se prolonge un peu.
Petit déjeuner salé. Pluies régulières aujourd’hui, repos à l’intérieur. En regardant la TV locale je vois un historique rassemblement de parti politiques d’opposition, c’est l’occasion d’en apprendre plus grâce à Wikipedia (l’Inde c’est un parfois une fédération d’états tellement c’est grand). Je découvre également deux unités, le lakh pour cent mille (100,000) et le crore pour dix million (1,00,00,000 avec cette séparation de virgule particulière). Le genre d’unité qui va bien pour parler de tel chantier à venir ou du poids financier de cet homme d’affaire finalement devenu moine et donnant sa fortune aux œuvres.

Petit aller-retour à l’aéroport pour voir le trajet à pieds cette fois (faisable, j’ai trouvé le trottoir que je cherchais la veille). Goûter un petit beignet frit. Prendre un bol de riz et légumes au restaurant de l’hôtel, plutôt conséquent, épicé aussi (je me demande si il faut laisser un pourboire, en fait non dans ce cas). Ce soir je me rend compte que le bruit des klaxons est continu, sauf une pause entre 1h et 2h du matin. Vivement le calme de la montagne.

18 juillet : CCU-PBH / challenge jour 2

Debout avec le levé du soleil (5h). Aéroport, avion, bus, hôtel, et enfin rejoindre le groupe au Super FabLab (13h) !
Depuis quelques éditions, la semaine qui précède la conférence voit un défis occuper des volontaires, jusque-là c’était quelque chose de plutôt informel, auquel participait une petite vingtaine de personnes. Cette année on doit être presque une centaine, répartis en 5 groupes sur différentes thématique/régions, et l’enjeu est de pouvoir concrètement améliorer le quotidien ici en s’appuyant sur tout ce monde (incluant des participants locaux heureusement), les différents FabLabs du pays, savoir-faire, connaissances, etc… C’est très sympa pour faire des liens en fabriquant quelque chose ensemble, et commencer à découvrir le coin.

Petit rattrapage de l’état d’avancement de l’équipe, et hop repas en commun.
Plein de pistes d’action ont été envisagée, les trois principales : réduire la fatigue sur les métiers à tisser (améliorer maintenant), un kit éducatif pour enfants (attirer pour plus tard), et un site web pour partager/documenter notamment les motifs et diffuser ainsi cette culture.
Ce soir je me sens mal, mais j’ai eu ça aussi lors d’autres voyages, ça devrait passer.

19 juillet : challenge jour 3

Ce matin ça va effectivement mieux.
En retrouvant les autres j’ai une impression de familiarité alors qu’on ne s’était pas côtoyé avant, c’est un peu une famille de travail, l’effet réseau fait qu’on a déjà pas mal de bases communes.
Ce matin on visite le Green Weaving Center (healing textile video youtube), une entreprise sociale qui promeut le tissage depuis longtemps ici. Sur les murs, la plupart des motifs sont représentés, c’est précieux pour nous. On termine par une présentation dansée/chantée qui raconte certains gestes du métier.
Ensuite petit passage à la Royal Textile Academy où une exposition des projets de couture de la Fabricademy se prépare (je note d’aller voir « Valentina », software for parametric fabric pattern design), et le but initial : revoir comment travaillent les tisserandes, s’essayer au geste, et se rendre compte que l’idée de remplacer le harnais par une sorte de dossier/chaise va demander de revoir comment le faire (le relâchement de la tension étant beaucoup plus fréquent que ce qu’on pensait).

Repas en commun au Super FabLab.
Finalement je me retrouve à travailler sur la documentation et les fameux motifs. On a un super livre comme référence, et il va falloir transcrire une douzaine de motifs pour avoir un début d’une base vectorielle utilisable.
Repas en commun à l’hôtel, ce soir on goûte un dessert (sorte de petite boule, spongieuse, un peu dense, imbibée sucrée) et des gâteaux d’une patisserie (très bons, la génoise est maîtrisée ^^).

20 juillet : challenge jour 4

Debout relativement tôt, je commence à m’acclimater, ça se sent aussi en montant les escalier, moins essoufflé.
Hier le dessin des motifs avait bien avancé, il ne restait qu’un dernier à faire. On ajoute ensuite des photos d’exemples pour montrer les variations.
Ce midi encore un chien sauvage est à l’entrée du bâtiment, à la fin du repas il finira par avoir quelques os à mâcher.
La collection de motifs prend forme, une première ébauche du site Internet prend forme, ça devrait être sympa.
Maintenant qu’on a des versions vectorielles c’est aussi utile pour le groupe du kit éducatif, mais je réalise qu’il me faut prévoir une version type silhouette noire sur fond blanc qui soit directement utilisable sans aucune modifications. C’est reparti pour un tour, c’est aussi l’occasion de refaire certains motifs un peu mieux. Et découper plein de stickers !
On commence à voir arriver pas mal de gens, futurs participants de la conférence, des têtes connues, des nouvelles, quelques mises en lien s’imaginent (Djibouti-ForgeCC).
Repas en commun, une partie du groupe est allé en ville, échanges de morceaux de vie, notamment de folklore local (le tonnerre gronde ça pourrait être signe d’un dragon), sympa.

21 juillet : challenge jour 5

On a collectivement bien avancé, mieux que ce qu’on pensait au départ, mais le temps est presque écoulé, c’est censé être le dernier jour !

Sauf que, confiant sur la nourriture j’ai peut-être un peu trop mangé, nuit agitée, digestion difficile… pas au top de la forme pour continuer.
Je reprends tout les fichiers des motifs pour ajouter des métadonnées. En plus des stickers, on fait découper deux grands motif (Thakpa pour le losange et Dramey pour le nœud éternel) avec l’impressionnante Zund (vue chez un imprimeur à Caen, mais là disponible!) ainsi qu’une série de boites en carton pour les kits pour enfants. Encore un peaufinage de la collection de motifs, ajout des liens vers les versions silhouettes. Aider à plier et préparer les boites des petits kits.

Repas en commun, minimal, ne me sentant pas encore bien.
Ajout d’un glossaire des termes généralement employé pour les vêtements traditionnels. Réparation de la presse à t-shirt du FabLab (ça pourra toujours aider pour mon workshop de la semaine suivante).

Repas en commun sur place plutôt qu’à l’hôtel pour grappiller quelques heures de plus. On tente un jeu, la version anglaise de « ça touche, ça touche pas », mais la phrase est « I’m going to the moon, and I bring… », et la règle à deviner n’est finalement pas la même que ce que je pensais au départ 😀
Il nous reste à préparer le stand, et notamment des affiches pour les différentes partie du projet. J’ai également pu faire un test de recyclage avec la presse chauffante.

22 juillet : challenge jour bonus

Jour bonus mais avec beaucoup de logistique !

Petit déjeuner, et check-out de l’hôtel fournis pour le challenge, maintenant c’est à nous de nous débrouiller. On met tout dans la navette et direction le SuperFabLab pour une dernière journée pendant que les autres équipes font le chemin retour vers la capitale.

On fait un peu d’impression 3D (14 machines disponibles mais 6 opérationnelles), pour les kits pour enfants, mais aussi une pièce pour une des équipes qui arrivera tard ce soir. Je commence à préparer également la mise en ligne de la collection de motif sur Thingiverse pour compléter et permettre un remix/contribution plus simple que sur notre site. Grosse journée documentation pour tout le monde.

Décoration des 32 boites du mini kit, jusque tard ce soir… Aller dans un autre FabLab c’est aussi l’occasion d’apprendre d’autres outils/logiciels (e.g. Cut Studio pour la Roland GS-24 quand j’ai plus l’habitude de la GX-24). Beaucoup d’échenillage, puis de transfert, mais délicat car il colle beaucoup, trop vite ça arrache du carton. Si le couvercle est fait à l’autocollant, un QR code au dos est fait lui façon sérigraphie.

Derniers efforts coté traduction pour le livret d’instruction du mini-kit. Et vers 18h on monte dans notre navette pour le centre ville. Transfert de quelques valises, nouvel hôtel, juste pour cette nuit afin d’être déjà sur place pour le festival du lendemain sur la place centrale.
Repas en commun avec toute l’équipe, un bon groupe de quand même 20 personnes et plus, sur les dernières heures d’ouverture d’un café. Les 32 livrets d’instructions pour les mini kits ont été fait en quelques heures ! Presque prêts pour demain, gros boulot collectif, mais gros résultats aussi !

23 juillet : festival

Petit déjeuner dans cet hôtel qui donne sur la place du festival. Les tentes ont été construites y compris une partie de la nuit, ce matin c’est à nous de remplir nos espaces, tandis que des passants circulent déjà un peu (on est sur la place centrale de la capitale aussi).
Hop, en mode foire expo, peut-être 2000 personnes sur la journée ? Bons retours coté métier à tisser, plein d’enfant qui ont tissés des bracelets avec le mini kit, et la collection de motifs intéresse aussi 🙂
Ce soir un événement est prévu dans un bar légèrement excentré avec surtout une capacité d’accueil pour recevoir une centaine de personnes.

(le coté travail puis exposition me fait penser à InnovAfrica)

Petite collection de lien

https://fab.city/weaving-technology-into-tradition-the-gawa-project/

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *